Patinage
Un jour blanc, laiteux. Sans conscience du décors, et sans vraiment m'en apercevoir, je cours, les jambes douloureuses. Un mur, lui aussi sans couleur, se rapproche. Contre ma volonté, mes pas s'accélèrent. L'incompréhension me saisit en même temps que se précise l'imminence de l'impact. Enfin, alors que je vais heurter le rempart, j'ouvre la bouche pour crier et... me réveille.
Malgré cette mauvaise nuit, je me lève de bonne humeur, relate mon rêve et en rit. J'ai à l'esprit l'excès de sport de la veille, que je relie à mon songe. Un psychologue prend part à la discussion. Selon les théories de l'inconscient qu'il énonce, il serait admis que l'une des trois explications au rêve typique du choc, et la plus probable après avoir entendu les autres, serait la proximité d'un changement important.
Persuadé du rapport entre l'inconscient et le conscient, mais peu au faîte des théories de Freud et de sa suite, et en vérité un peu réticent aux théories simplistes du professionel bolivien, je serais cependant prêt à accepter d'établir certains recoupements avec ma situation actuelle.
Une autre facette de l'imagerie collective me vient à l'esprit pour étayer mon impression. Je repense à ces personnages de dessins animés ou clowns de vieux films, aux pieds posés sur deux patins allant en sens opposé, deux rails, deux icebergs qui s'ecartent inexorablement. Impuissants à en choisir un seul et incapable d'éviter l'immanquable, le bonhomme est contraint de plonger pour rejoindre l'un d'eux.
La fin de la construction s'approchant avec la joie de voir se terminer le chantier, l'appréhension de voir se terminer l'aventure actuelle et d'arriver le changement de vie, je vais devoir plonger et élire ma banquise. Choisir entre une vie de Belge en Bolivie (ou ailleurs) et une vie en Belgique avec les expériences boliviennes. Entre les tropiques et le froid. Entre les jolies métisses et les charmantes Belges. Entre le plaisir de trouver l'ombre des palmiers, et l'agréable sensation, difficile à comprendre pour qui n'en a pas été sevré, d'une promenade le long de la Meuse un jour de pluie. Entre la cueillette de mangues ou de canne à sucre, et l'odeur des bois belges au printemps et leurs couleurs de l'automne. Entre les routes boliviennes atypiques et les tristes autoroutes belges d'un soir d'hiver.
Contrairement aux éternels acariâtres qui pensent que seule l'opulence leur est acceptable, je me rends compte de la chance du choix. Certains expatriés ou voyageurs au long cours se plaignent de certains désagréments. Sont ils conscients de leur chance? S'ils ne sont pas satisfaits, il leur est loisible de retourner dans un pays "développé" et chercher un travail, ce qui n'est pas permis aux Boliviens. Ils oublient de dire qu'un salaire d'expatrié (même le SMIC belge comme moi, voire le chomage belge) offre de bonnes possibilités ici. Dans un pays où le pouvoir de l'argent est moins bridé, leur position sociale et leur compte en banque leur offre une sensation de pouvoir, dont certains profitent, comme toujours. La nature même des emplois disponibles à l'étranger est en général plus intéressante, du fait de l'offre restreinte de "spécialistes", et du faible niveau de rigueur de la formation bolivienne que je ne voulais pas voir en arrivant, mais dont je suis persuadé par expérience.
Un pied sur chaque iceberg, je sais qu'ils s'éloignent. L'un chariant la culture qui est la mienne, le pays de ma famille et mes amis, les réalités communes qui n'existent pas vraiment mais que l'on sait. L'autre promettant l'enrichissement culturel, le partage du meilleur, la découverte, le métissage. Après tant de chaleur, je crains l'eau froide.
Malgré cette mauvaise nuit, je me lève de bonne humeur, relate mon rêve et en rit. J'ai à l'esprit l'excès de sport de la veille, que je relie à mon songe. Un psychologue prend part à la discussion. Selon les théories de l'inconscient qu'il énonce, il serait admis que l'une des trois explications au rêve typique du choc, et la plus probable après avoir entendu les autres, serait la proximité d'un changement important.
Persuadé du rapport entre l'inconscient et le conscient, mais peu au faîte des théories de Freud et de sa suite, et en vérité un peu réticent aux théories simplistes du professionel bolivien, je serais cependant prêt à accepter d'établir certains recoupements avec ma situation actuelle.
Une autre facette de l'imagerie collective me vient à l'esprit pour étayer mon impression. Je repense à ces personnages de dessins animés ou clowns de vieux films, aux pieds posés sur deux patins allant en sens opposé, deux rails, deux icebergs qui s'ecartent inexorablement. Impuissants à en choisir un seul et incapable d'éviter l'immanquable, le bonhomme est contraint de plonger pour rejoindre l'un d'eux.
La fin de la construction s'approchant avec la joie de voir se terminer le chantier, l'appréhension de voir se terminer l'aventure actuelle et d'arriver le changement de vie, je vais devoir plonger et élire ma banquise. Choisir entre une vie de Belge en Bolivie (ou ailleurs) et une vie en Belgique avec les expériences boliviennes. Entre les tropiques et le froid. Entre les jolies métisses et les charmantes Belges. Entre le plaisir de trouver l'ombre des palmiers, et l'agréable sensation, difficile à comprendre pour qui n'en a pas été sevré, d'une promenade le long de la Meuse un jour de pluie. Entre la cueillette de mangues ou de canne à sucre, et l'odeur des bois belges au printemps et leurs couleurs de l'automne. Entre les routes boliviennes atypiques et les tristes autoroutes belges d'un soir d'hiver.
Contrairement aux éternels acariâtres qui pensent que seule l'opulence leur est acceptable, je me rends compte de la chance du choix. Certains expatriés ou voyageurs au long cours se plaignent de certains désagréments. Sont ils conscients de leur chance? S'ils ne sont pas satisfaits, il leur est loisible de retourner dans un pays "développé" et chercher un travail, ce qui n'est pas permis aux Boliviens. Ils oublient de dire qu'un salaire d'expatrié (même le SMIC belge comme moi, voire le chomage belge) offre de bonnes possibilités ici. Dans un pays où le pouvoir de l'argent est moins bridé, leur position sociale et leur compte en banque leur offre une sensation de pouvoir, dont certains profitent, comme toujours. La nature même des emplois disponibles à l'étranger est en général plus intéressante, du fait de l'offre restreinte de "spécialistes", et du faible niveau de rigueur de la formation bolivienne que je ne voulais pas voir en arrivant, mais dont je suis persuadé par expérience.
Un pied sur chaque iceberg, je sais qu'ils s'éloignent. L'un chariant la culture qui est la mienne, le pays de ma famille et mes amis, les réalités communes qui n'existent pas vraiment mais que l'on sait. L'autre promettant l'enrichissement culturel, le partage du meilleur, la découverte, le métissage. Après tant de chaleur, je crains l'eau froide.
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